Le 18e Sommet de la Francophonie et ses événements connexes eurent lieu du 13 au 22 novembre 2022 ; une semaine d'échanges interculturels à Djerba, « l’île des Rêves », telle que la dénommait Gustave Flaubert en 1858. 31 chefs d’État et de gouvernement, 35 ministres des Affaires étrangères, près de 600 journalistes et des milliers de Tunisiens et acteurs de la société civile, firent le déplacement pour le Sommet, le village de la francophonie et le Forum économique.
Les présidents de Tunisie et de France, Kaïs Saïed et Emmanuel Macron, se félicitèrent de la tenue de ce sommet. Quant à Louise Mushikiwabo, elle fut reconduite dans ses fonctions de secrétaire générale. Le thème du Sommet, “La connectivité dans la diversité”, marqua la célébration du cinquantenaire de la Francophonie. A noter l’adoption d'un nouveau cadre stratégique pour l'OIF, de l'APF et des Opérateurs, ainsi que de la Déclaration de Djerba. Cette-dernière mit l’accent sur le développement d’une culture du numérique en éducation, sur la nécessité d'améliorer la mobilité des personnes et de parvenir à un règlement pacifique des conflits au sein de l’espace francophone.
Plus largement, ce sommet et ses événements connexes permirent de condenser des rencontres et de catalyser des projets , sous le Soleil de Tunisie exactement ! Merci à toutes les personnes qui rendirent ces moments instructifs, utiles, inoubliables et rendez-vous en 2024 pour le prochain sommet de la Francophonie qui aura lieu en France !
La veille de l'ouverture du sommet de la Francophonie, le président du Niger Mohamed Bazoum accorda un entretien à TV5MONDE. Au micro de Françoise Joly, directice de l'Information de TV5MONDE, il expliqua l’importance de la langue française pour son pays, dont le premier président, Hamani Diori, fut l’un des pères fondateurs de la francophonie.
Emmanuel Macron rencontra les Jeunes Ambassadeurs francophones, sur proposition de Marie-Béatrice Levaux, initiatrice du programme en 2019 en sa qualité de présidente du comité Francophonie du CESE. Ce comité, composé de plusieurs ONG et institutions francophones (dont Francophonie sans frontières et l'AFAL) lança le programme des Jeunes ambassadeurs francophones, destiné à renforcer l'appartenance à la francophonie.
Pour avoir participé à la genèse du projet et l'avoir suivi de A à Z avec d'autres responsables comme Nacer Kettane, je ressentis de la fierté en écoutant Marie-Béatrice et nos quatre jeunes (parmi une soixantaine de JAF) dialoguer avec le Président de la République française, l'auteure Leïla Slimani et la chanteuse Yseult. Mehdi, Vanessa, Kodjo, Jean-Daniel, représentèrent brillamment leurs collègues ! Laura-Françoise Lebeau, Jacques Krabal et Philippe Péjo prirent une part active à ce projet. Nos organisations sont fières de la participation de ces jeunes au Sommet de Djerba et plus largement au grand projet francophone.
Nous apprîmes que le Château de Villers-Cotterêts (situé dans l’Aisne), siège de la cité internationale de la langue française, abriterait tout ou partie du prochain sommet de la Francophonie en 2024.
Une présentation de l'avancement de ce projet majeur par le président du Centre des monuments nationaux et la cheffe du projet Valérie Senghor (avec qui nous avons ensuite déjeuné) permit de mesurer l'avancement de la restauration de l'édifice royal et de l'installation prochaine du parcours permanent et des espaces d'accueil, de librairie, de conférence, d'atelier, etc.
Le 20 novembre à 9h15 sur Radio Tunis chaîne internationale, au micro d'Inès Jelassi Moussa à Djerba, je plaidai pour un nouveau partenariat entre la Francophonie et l'Arabophonie, deux aires linguistiques majeures qui portent en elles la diversité et qui ont intérêt à coopérer.
J'appelai également l'Organisation internationale de la Francophonie, les Opérateurs et la Conférence des OING à mettre en place des groupes de travail pour proposer au prochain Sommet de la Francophonie des mécanismes de mobilité légale, temporaire, sectorielle et réciproque. Sans ces mécanismes de mobilité intelligente et réciproque, la Francophonie perdra à l'avenir de sa substance et de ses opportunités. C'est un sujet dont la Conférence des OING devrait se saisir pour contribuer à trouver des solutions aux drames que nous vivons en Méditerranée.
Découverte du village de la francophonie au parc Djerba explore : tour des pavillons des différents pays avec le président du Cercle des solidarités francophones Jean-Pierre Chiaverini, également président de la Maison de la francophonie de Marseille, et plusieurs membres du Cercle : Hayet, Benoît, Kamel, Lionel...
Rencontres avec plusieurs membres du cercle et d'autres associations amies, notamment aux pavillons de la France, de la Côte d'Ivoire, du Nouveau-Brunswick, de Wallonie-Bruxelles, de l'Arménie, de la Roumanie, de la Genève internationale...
Le programme fut ponctué de nombreux concerts, animations et spectacles tout au long de la semaine, notamment de conférenciers, d'artistes et d'humoristes.
Le Village tunisien de la Francophonie, espace de partage, fut un échantillon de la pluralité et de la richesse culturelle francophone.
Favorisée par l'Institut français de Tunisie, cette rencontre donna lieu à de beaux échanges entre les deux écrivains. Leïla Slimani déclara par exemple : « Mon seul passeport est celui d'écrivaine. Les livres insistent sur les permanences de l'humanité plus que sur nos spécificités individuelles ».
Le village de la francophonie était le lieu par excellence de rencontres interculturelles avec des responsables associatifs, médiatiques, entrepreneuriaux et publics venus de tous les horizons.
Mes amis de la société nationale de l’Acadie, Martin Théberge, son président, Véronique Mallet, sa directrice générale, étaient présents et actifs pour faire connaître et rayonner l'Acadie. Rendez-vous a été pris pour participer au Congrès Mondial Acadien en 2024 !
« Faire la distinction entre une opinion est un fait, c'est participer à la lutte contre la désinformation. Il faut élever l'éducation aux médias au rang de politique publique et la mettre dans les programmes scolaires. » – selon Andzongo Blaise, spécialiste du sujet, originaire du Cameroun.
Au cœur du village de la Francophonie, lors d'une émission, l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, par la voix de son président - le plus jeune de l'histoire - le député Canadien Francis Drouin et des deux porte-paroles du Parlement francophone des jeunes - Madina Tall et Federico Borre - de belles valeurs partagées entre peuples et entre générations furent exprimées !
Plus largement, j'étais ravi de revoir les membres de la délégation de l'APF, qui a vigoureusement mis de l'avant la francophonie parlementaire en soulignant devant les chefs d’État et de gouvernement la nécessité de l'intrication de l'action entre les institutions politiques de la Francophonie.
Côté société civile, Francophonie sans frontières était aussi bien représentée à Djerba : par son président Ronan Dumas-Labbé, sa vice-présidente Zoé Durteste-Erca, la JAF 2022 Vanessa Lebeka et moi-même. Avec Ronan, mon successeur, nous avons fait un clin d'œil à l'équipe de FSF en RDC.
Au Village de la Francophonie, nous prîmes part à plusieurs conférences et émissions en direct, notamment à l'avant-première de l'émission Maghreb Orient Express spéciale Djerba, diffusée sur TV5MONDE. Cette présentation en présence de l'équipe de l'émission (Mohamed Kaci, Xavier Marquet…) et la complicité d’Ivan Kabacoff, présentateur lui de Destination Francophonie fut un moment convivial et stimulant sur le Pavillon de la Francophonie.
Entre Paris et Djerba, par un dispositif inédit, la rédaction de TV5MONDE couvrit le 18e Sommet de la Francophonie : invités, reportages, directs, coulisses… La Plateforme TV5MONDE+ fut également promue auprès du public.
En marge du Sommet, déjeuner de travail avec la délégation roumaine. En Roumanie, pays membre de l'OIF, très actif au sein de l'Agence universitaire de la Francophonie, il est possible d'étudier dans plus de 115 filières universitaires francophones ! Le Président de l'AUF est d'ailleurs le Professeur roumain Sorin Cimpeanu. La délégation de la Roumanie est présente à Djerba aux côtés de pas moins de 87 délégations de l'espace francophone. Toujours un plaisir d'échanger avec mes amis roumains, notamment Ruxandra Mangu que je connais depuis quelques années.
Durant cette semaine, Djerba fut le cadre de riches échanges internationaux francophones et des découvertes du patrimoine local par les délégations internationales. J'ai accompagné celles du Canada, de la Roumanie, de la Louisiane, grâce à l'Office national du Tourisme de Tunisie.
Sur cette île de confluence des cultures, des religions et des civilisations qui se sont inter-fécondées au fil du temps, le mythe et l'histoire s'entremêlent, d'Ulysse à Djerba la Douce, en passant par Dragut, le navigateur et amiral ottoman d'ascendance grecque.
Réputée pour son dialogue inter-religieux, Djerba abrite divers lieux de culte que nous avons visité : la synagogue de la Ghriba, l'église Saint-Joseph, les mosquées (dont celle, souterraine, de Bardaoui)... Nous avons également pris connaissance des collections du musée du patrimoine traditionnel et déambulé dans le village d'Erriadh qui abrite Djerbahood, lieu artistique et artisanal investi par les artistes d'art urbain de plusieurs pays.
Au fort espagnol devenu ottoman, témoin des différentes strates civilisationnelles qui cimentèrent l'histoire djerbienne, les pierres érodées me firent penser à des coraux. De ces murs percés d'ouvertures autrefois défensives, on voit la Méditerranée depuis sa rive sud. Cette Méditerranée chère à mon cœur, berceau de civilisations sœurs, matrice de références communes, écosystème partagé, doit demeurer une interface et pas un cimetière. Or, les drames des migrations clandestines ne font pas l'objet d'une recherche suffisamment active de solutions politiques.
Signature du livre d'or de l'office national de l'artisanat tunisien, le 20 novembre 2022. Travail du cuivre de la céramique du tissage de la poterie du verre les
Tunisiens excellent dans l'artisanat et perpétuent des savoir-faire séculaires. En témoignait sur place la présentation de livres et d'objets qui seront réunis dans un futur Musée du Patrimoine
écrit, mais aussi de commerces au village qui présentaient un échantillon de l'artisanat local.
Autre temps fort de la semaine, les 21 et 22 novembre, le Forum Économique de la Francophonie permet de favoriser les projets d’investissements croisés, de nouer des partenariats porteurs et de faire avancer la francophonie économique, sujet important de ces Carnets francophones depuis 2013.
Leader en la matière, le Québec insista via son premier ministre François Legault «sur l'importance du français, troisième langue d'affaires dans le monde». Celui-ci déclara : « La première responsabilité que j’ai, c’est d’assurer la pérennité du français » ; « Les francophones de partout dans le monde sont bienvenus au Québec. »
Pour le Québec, la création de richesse et la promotion du français vont de pair sur la scène internationale. Des acteurs majeurs du monde économique québécois avaient donc fait le déplacement. A la soirée du Forum économique de la Francophonie, je fus heureux de retrouver Pierre Graff, président du RJCCQ, mais aussi d’échanger avec Ruth Vachon, présidente-directrice générale du Réseau des Femmes d'affaires du Québec, Karl Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec, Geoffroy Roux de Bezieux, président du MEDEF, Fabrice Le Saché, président de la société AERA, très investi sur les échanges économiques francophones ! Une soirée économique où j'eus le plaisir de retrouver également Ronan Dumas Labbé, Zoé Durteste-Erca et de faire la connaissance d'Ines Oueslatibh.
Le Québec s’investit en parallèle sur la question de la découvrabilité des contenus francophones en ligne. Un panel sur ce sujet a permis de discuter des occasions et des défis associés au repérage et à la valorisation des contenus francophones sur la toile, en la présence du Scientifique en chef du Québec Rémi Quirion, qui avait lancé, le 3 novembre dernier, le Réseau francophone international en conseil scientifique.
A noter que le Canada, pour sa part, était représenté parle premier Ministre Justin Trudeau, accompagné de la ministre Mélanie Joly. Le chef du gouvernement canadien voulut appuyer la démocratie et les droits humains, promouvoir le français et parler des conséquences de la guerre russe sur la sécurité alimentaire et énergétique. Une action spécifique fut menée à l’égard d’Haïti. Le Canada, par ses divers paliers de gouvernement, ses parlementaires, ses investisseurs, était bien présent au sommet, au forum économique et au village de la Francophonie. J’eus de beaux échanges avec les responsables des pavillons Canadien, Québécois et Néo-Brunswickois. Je fis aussi la connaissance d’un artiste pluridisciplinaire et investisseur de Toronto, Abel Maxwell, avec qui nous évoquèrent le renforcement des liens Canada-France à travers l’art et le leadership.
A Houmt Souk, dans une maison traditionnelle joliment rénovée, inauguration de la nouvelle Alliance française de Djerba en présence de l'écrivaine Leïla Slimani, du ministre tunisien de l'Education Fethi Sellaouti, de l'ambassadeur de France en Tunisie André Parent, du président de la Fondation Alliances françaises Yves Bigot.
Le secrétaire général de l'AF de Djerba, Skander Ali Gacem, me fit visiter les locaux et salua l'action de FSF. J'eus le plaisir de retrouver Lou Vernier, présidente de l'association Les Politistes de Créteil, en mission d'appui à l'Alliance, ainsi que la Nada Najahi, directrice de l'Alliance française de Bizerrte et Larbi Benatia, président de l'Association de soutien au programme Med 21, qui organisait le lendemain un concert littéraire, florilège de la poésie tunisienne francophone.
Ce forum, qui se tint les 17 et 18 novembre à Houmt Souk, au Centre Des Ressources Associatives, fut l'occasion de découvrir le travail remarquable des associations tunisiennes, des ONG et des acteurs internationaux du développement, de la bonne gouvernance et des droits humains, tels que le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et le Programme des Nations unies pour le Développement - qui contribua à la publication d'une très intéressante étude sur les facteurs favorisant l’extrémisme violent dans la Tunisie post-révolutionnaire (2011-2021).
Je rencontrai sur place Clément Eyraud, membre de l'équipe Justice et Droits humains du PNUD Tunisie ainsi qu'Hélène Ferrer, attachée de coopération avec la Société civile à l'Institut français de Tunisie.
Cet événement s'accompagna d’un marché traditionnel et fut rehaussé par la prestation d'un jeune musicien extraordinaire, Khalil Chahbani, qui réinterpréta magnifiquement La bohème de Charles Aznavour.
Habib Bourguiba, premier président de la République tunisienne indépendante et fervent militant de la Francophonie, aurait été fier que ce sommet se tienne en Tunisie, à Djerba. Je voulus rappeler pourquoi Habib Bourguiba choisit la Francophonie. Il fut motivé par raisons principales, rappelées dans cette courte vidéo extraite de la soirée que j'ai organisée en amont du Sommet à Paris.
Le 18 novembre, l'Observatoire du multilatéralisme et des organisations internationales publia un portrait d'Habib Bourguiba de ma plume.
Il reste désormais à encourager l’ouverture d’une maison de la francophonie à Monastir, sa ville natale.
Le 25 février 2020, Benjamin Boutin assista à une conversation à l'Alliance française de Paris Île-de-France à une conversation littéraire sur le thème "Je viens de loin, j'écris en français" entre deux auteurs tunisiens francophones de grand talent, l'illustratrice et auteure de romans graphiques Chadia Chaibi-Loueslati et l'écrivain Yamen Manai. Cette conversation permit de saisir leur rapport à l'écriture et les "aller-retour" entre l'arabité et la francophonie dans leur rapport intime à la littérature.